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Libération
Critique

Le parcours des combattantes.

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Par une poétesse canadienne, les paroles de celles qui, dans les conflits, sont du côté du sang et des larmes.
publié le 22 février 2001 à 23h06

Il est trop énigmatique, ce titre aux trois prénoms de femmes, et la bande «Femmes dans la guerre», est de ce fait bienvenue; elle situe d'emblée ces inconnues là où la Canadienne Jeanne Gagnon est partie recueillir leurs paroles, au coeur des pays meurtris par les conflits.

Livre témoignage qui veut «percer le rôle des femmes», il ne relève pas d'une quête scientifique. On évitera donc de lui reprocher le non-respect des précautions d'usage mais on aura soin de ne pas se tromper sur la nature de cet ouvrage. La plume de l'auteur est trempée dans l'encre de la poésie, certes on doute que ces mots puissants et beaux appartiennent à ces femmes brisées, on s'étonne au reste de leur soudaine capacité à rompre leur silence, à suspendre leurs délires pour s'y abîmer de nouveau la confidence achevée; mais la poésie est habile et gagne le pari de décrire et d'écrire l'indicible. Elle est un habillage pour adoucir le récit de l'insoutenable vécu des corps et des âmes.

Le voyage suit une géographie de l'horreur de la guerre qui déploie des formes sexuées et sexuelles. Le livre dessine des Balkans en Israël et Palestine, du Liban au Pakistan puis au Sri Lanka une frontière qui place le masculin du côté des combats et de la violence et les femmes du côté du sang et des larmes. Les violences n'ont ni même visage, ni même usage mais elles sont au coeur des dispositifs guerriers ou antidémocratiques: du viol ethnique et politique dans les Balkans à la «talibanisation» des Pakistanaises, du «