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Libération
Critique

Augiéras, l'illusion cosmique.

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Réédition et biographie de l'écrivain et peintre , pétainiste bucolique, qui prenait l'histoire à contresens.
publié le 8 mars 2001 à 23h56

Il faut peut-être comprendre toute l'oeuvre d'Augiéras comme une réhabilitation de la poussière, comme une ode à la vieillerie. Ou, si l'on préfère, à l'immortalité païenne, à l'âge d'or chanté par Virgile dans sa fameuse quatrième églogue, avenir splendide qui est aussi derrière nous, dans une conception cyclique de l'Histoire partagée par les anarchistes et les réactionnaires. Car il faut tout de même un beau culot, une nette envie de provoquer, pour faire paraître en 1968 un livre intitulé Une enfance au temps du Maréchal et où on lit: «Mettons de côté ses erreurs, ses responsabilités criminelles, surtout à partir de 1943, supposons que le régime de Vichy ait duré très longtemps; une curieuse civilisation agricole serait apparue, composée en majorité d'intellectuels venus à la terre, de gens se réunissant le soir pour faire de la musique, du théâtre, du tissage, de la céramique, pour parler philosophie; régressée, peut-être, une civilisation d'artistes, de poètes.» Des notations comme «le luxe des magasins d'Alger: c'est la mode de Paris mise à la pire sauce israélite» ne sont pas mal non plus.

Il y a un désir d'être périmé de son vivant assez touchant chez Augiéras. Dès le Vieillard et l'enfant (1949-1954) et le Voyage des morts (1957), livres cultes, magiquement incantatoires ou péniblement redondants selon l'humeur du lecteur, la bisexualité cosmique, le Sahara intact et l'immoralisme ovin sentent leur Nourritures terrestres. Gide hante d'ailleurs cette Enfance au temps