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Libération

Salauds du livre.

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publié le 15 mars 2001 à 0h03

C'est bien joli d'écrire des livres (et d'en lire), mais il faudrait penser aussi à en vendre (et en acheter). Editeur, romancier et poète, Michaël Krüger, né en 1943 et qui a obtenu le prix Médicis étranger en 1996 avec Himmelfarb, s'intéresse en vingt et une courtes nouvelles et avec un humour pince-sans-rire à tous les aspects de la chaîne du livre, depuis la littérature prétendue «illisible» jusqu'à la pire commercialisation. On ne sait plus si les écrivains sont (éventuellement) admirables en raison de ce qu'ils écrivent ou en raison du succès de ce qu'ils écrivent. Un de ses narrateurs peut ainsi se flatter d'avoir «trouvé mon style relativement tôt ­ plus tôt que ce malheureux Kafka, et plus tôt aussi, par exemple, que Thomas Mann, un modèle pourtant sur le plan économique».

A la fin de «Pourquoi Pékin?», le dernier texte de Pourquoi moi?, son premier livre traduit, Michaël Krüger écrit: «La vie des autres, comment l'imaginer quand la sienne propre paraît à peine concevable? On rencontre quelqu'un avec qui l'on vit, on l'aperçoit au milieu d'un monde impénétrable, injustifiable, au milieu d'une masse branlante de convictions et de désirs qui s'élève au-dessus de la réalité. Il s'est forgé un système d'erreurs et souffre maintenant pour des raisons dont la futilité remplit l'esprit d'épouvante, il se consacre à des valeurs dont le ridicule saute aux yeux.» Le ridicule est, pour Michaël Krüger, ce qui lie entre eux les membres de la grande famille littéraire, du poète au