L'opposition entre l'Ouest et l'Est, communément désignée sous le terme de guerre froide, a largement contribué à structurer les relations internationales du second vingtième siècle. Amenant, à plusieurs reprises, le monde au bord du gouffre qu'il suffise de rappeler la crise de Cuba en 1962 , cet affrontement reste, à bien des égards, nimbé de mystère. Les objectifs réels poursuivis par les acteurs provoquent les supputations les plus diverses. Et dans une ère marquée par la dissuasion nucléaire, la part respective de la préméditation et de l'improvisation sont difficiles à démêler. Professeur à la Sorbonne, Georges-Henri Soutou s'est donc attelé à un chantier titanesque dont il dévoile, fort d'une parfaite maîtrise du sujet, les méandres.
Il place l'amorce du conflit en 1943, date à laquelle Staline, sûr de la victoire, récuse implicitement l'entente rêvée par Roosevelt pour se placer dans une logique d'affrontement avec le bloc capitaliste. Il s'agit bien, de fait, d'une lutte idéologique entre deux systèmes rivaux. Minimisant la composante doctrinale du régime soviétique, nombre d'auteurs ont parfois assimilé la diplomatie soviétique à une entreprise territoriale renouant avec les rêves hégémoniques de la Russie tsariste. L'auteur ne partage pas cette thèse réductrice, et démontre que l'idéologie a toujours maintenu ses droits, y compris sous Brejnev et Gorbatchev. Parfois soupçonné d'avoir renoncé au messianisme rouge au profit d'un conservatisme immobile, Léonid Brej