Impossible de cantonner Jack Goody dans une discipline, fût-elle la sienne l'anthropologie qu'il a puissamment contribué à décloisonner, en l'ouvrant aux autres sciences sociales, notamment à l'histoire. Comme le montrent ses deux livres sur la famille, son approche transculturelle laisse émerger les lignes d'une théorie générale des sociétés humaines. Une retenue lui venant de l'empirisme anglo-saxon et de sa suspicion envers les grands systèmes l'empêche peut-être de la formaliser. Chez lui, l'archive est aussi importante que l'enquête et le document oral, le langage des fleurs, les codes culinaires ou les rites funéraires, l'icône et le graphisme comptent autant que l'alphabet la comparaison doit s'exercer non seulement dans l'espace mais aussi dans le temps. Ainsi, il met à contribution, avec un égal bonheur, ethnographes et historiens: il faut bien s'appuyer sur les autres du moment qu'on ne peut pas tout savoir ni aller partout, même s'il est toujours en route pour de nouveaux terrains, l'Afrique où il a débuté en 1950, puis la Chine, l'Inde ou... la France autour de sa maison. Encyclopédiste de coeur et de raison, fuyant toute spécialisation, c'est parce qu'il ne trouvait pas dans les bibliothèques les livres qu'il aurait aimé lire, qu'il a fini par combler plus d'un vide dans les rayons du savoir universel. Proche de Georges Duby, ami de Moses Finley, le grand spécialiste de la Méditerranée d'Ulysse arrivé à Cambridge pour fuir le maccarthysme, ou d'Eric Hobsba
Interview
Un anthropologue s'est échappé
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publié le 3 mai 2001 à 0h45
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