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Libération
Critique

Tissu de Connelly.

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Un meurtre comme un tableau de Jérôme Bosch, un producteur accusé d'assassinat. Deux enquêtes croisées habilement tissées .
publié le 10 mai 2001 à 0h49

On ne peut pas être flic et porter impunément le même nom que le peintre Hieronymus Bosch. Surtout quand on travaille à Los Angeles, la Grande Babylone, qui ressemble de plus en plus à ce «Jardin des délices» (le tableau le plus célèbre et l'un des plus terribles de cet artiste de la Renaissance), dans sa version XXIè siècle. Alors, évidemment, quand un petit malfrat, soupçonné du meurtre d'une prostituée, est découvert supplicié à mort dans son appartement de la même façon qu'un des personnages peints par le maître dans le «Jardin», et que Harry Bosch, le policier en question, possède une reproduction de ce même tableau chez lui, qu'il est lui-même fils d'une prostituée assassinée, on peut se demander si le flic n'est pas passé «de l'autre côté». C'est-à-dire du côté de ceux qui, las d'une justice tragiquement impuissante à réduire le Mal, se prennent pour le bras armé d'un dieu vengeur. Terry Mc Caleb, un autre policier de Los Angeles et le héros de Créance de sang (1), l'un des précédents romans de Connelly, est convaincu que Harry Bosch est le tortionnaire et le meurtrier du truand. «Car, dit-il à une collègue, quand on regarde l'abîme, l'abîme lui aussi te regarde. Tu sais bien .. tous les clichés du genre. Sauf qu'il n'y a pas de clichés sans vérité derrière. Se plonger dans les ténèbres, c'est accepter de se faire envahir par elles et d'en laisser quelque chose. Il n'est pas du tout impossible que Bosch s'y soit plongé un peu trop souvent. Et qu'il s'y soit perdu.»

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