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Libération
Critique

Marcelle aimée.

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Romancière bien oubliée, Marcelle Tinayre (1870-1948) accorda une large place à l'amour à une époque où le désir féminin était tu.
publié le 24 mai 2001 à 0h58

Les travaux de Claude Schkolnyk avaient, avec bonheur, sorti de l'oubli l'action de la communarde et féministe Victoire Tinayre. Dans le sillage de cette combattante qui cosigna ou rédigea les écrits de Louise Michel, Alain Quella-Villéger s'intéresse surtout à sa belle-fille, l'écrivain Marcelle Tinayre (1870-1948). Sa mère Louise Chasteau, étonnante amie de Marie Maugeret, fondatrice du Féminisme chrétien, avait été nommée, en 1880, directrice de l'Ecole normale d'institutrices de Fontenay-aux-Roses mais paya de sa radiation son esprit d'indépendance et d'innovation. Le destin des deux familles se lient en 1889. Ces femmes, plutôt que belles et rebelles (formule convenue qui dessert cette biographique attentive au genre, minutieuse, parfois jusqu'à l'excès) sont, elles, bel et bien des rebelles. La littérature est le porte-drapeau du combat de Marcelle Tinayre, romancière (La Maison du Péché, La Rebelle, L'Ennemie intime), journaliste et conférencière prolifique. Son originalité repose dans la place qu'elle accorde à l'amour, à une époque où passion de coeur et désir de corps au féminin sont tus, y compris par les féministes réformistes, au nom de la respectabilité stratégique. Aussi ses héroïnes, plus amoureuses que mères diffusent-elles un parfum de scandale. La vie personnelle de l'auteur, très anticléricale, est au diapason. L'audace de la romancière ne l'empêche pas d'être acceptée par le monde littéraire qui salue «les qualités de sensibilité féminine et d'intelligen