Menu
Libération
Portrait

Sepulveda. Tous les chemins mènent à l'homme.

Article réservé aux abonnés
Le Chilien Luis Sepulveda a usé ses souliers sur tous les continents mais pas ses espoirs. Dans «les Roses d'Atacama», il conte la vie de quelques militants obscurs dont la planète est le jardin. Rencontre dans les Asturies avec l'auteur du «Vieux qui lisait des romans d'amour», révélé en 1992 au festival «Etonnants voyageurs». Il sera de la douzième édition de Saint-Malo.
publié le 31 mai 2001 à 1h03

Un écrivain à succès a le privilège de pouvoir faire à peu près ce qu'il veut. Un écrivain d'aventures a le talent de ne pas avoir vécu toutes celles qu'il s'attribue. A 51 ans, Luis Sepulveda est les deux. Il voyage encore beaucoup. Il vit là où il se sent bien, à Gijon dans les Asturies. Il mange des fèves et du chorizo cuit, boit du cidre, blague volontiers et plante des arbres. Il écrit quand il en a envie, milite pour l'environnement et contre la démocratie sans mémoire du Chili. Là-bas, ce combat est mal vu: certains journaux et des écrivains l'accusent d'être en partie mythomane quand il évoque son passé de militant de gauche révolutionnaire, ses années de prison sous Pinochet, ses multiples vagabondages. Ce genre de rumeurs viennent du pays natal et parfument toujours les exilés quand ils deviennent célèbres. Celle-ci est née au moment précis où Sepulveda s'en est pris à la lâcheté des gouvernants et de certains intellectuels chiliens quand Pinochet fut arrêté: il fallait détruire la légitimité du gêneur. Il est possible que l'écrivain-voyageur ait arrangé son parcours, qu'il l'ait semé d'inventions: un biographe anglo-saxon finira, comme toujours, par visiter sa tombe. Mais tout écrivain fabrique son personnage comme il imagine les autres: avec des mots, des récits, des idées. Et, avec le temps, ce personnage de phrases devient plus vrai que vrai: il impose sa vérité. Sepulveda a creusé le sien dans la nostalgie active de Jules Verne, de Stevenson, d'Hemingway, et e