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Libération

Chacun cherche son Graal.

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publié le 14 juin 2001 à 1h15

Le plus sacré, dans le Graal, est sans doute sa contribution à l'histoire du genre romanesque. Sa fameuse quête, ce serait celle de la littérature.

Le premier volume (il y en aura trois) de ce bilingue Livre du Graal comprend trois romans aux auteurs inconnus (mais qu'est-ce qu'un auteur médiéval?) écrits entre 1220 et 1245: Joseph d'Arimathie, Merlin et les Premiers Faits du Roi Arthur. Ce sont des textes en proses et des romans, puisqu'écrits en langue romane, c'est-à-dire pas en latin. Pour sa part, Chrétien de Troyes a écrit Perceval ou le Conte du Graal entre 1181 et 1191. Le retentissement de cette oeuvre en vers a donc été tel qu'on en voit très vite surgir des continuations et que le travail de Chrétien, ainsi que celui, également en vers, de Robert de Boron, installent rapidement cet épisode sacré de la légende arthurienne. Le graal, c'est un «veissel», un récipient, plat ou vase, ciboire ou calice selon les textes, qui aurait d'abord servi à Jésus pour la Cène, puis à recueillir le sang du crucifié. Ce conte est désormais si ancré en nous qu'on le croit quasi contemporain du Christ, provenant plus ou moins de la Bible ou des apocryphes tardifs. Comme le raconte Philippe Walter dans sa passionnante introduction, c'est en vérité Chrétien qui, le premier, a préparé cette christianisation de la légende arthurienne et de toute la matière de Bretagne dans un vers célèbre: «Tant sainte chose est li Graax» («Tant le Graal est sainte chose»), ce Graal qui soutient et réconfo