La Chine est pour les Occidentaux, selon l'expression de Simon Leys, «l'autre pôle de l'expérience humaine». Autant dire que les incompréhensions entre les deux cultures peuvent être nombreuses. Repérer les vrais écarts et les fausses proximités, voilà à quoi s'attelle le sinologue Ivan P. Kamenarovic à partir d'un exemple limité, celui du conflit.
Son constat de départ est qu'il s'agit là d'une notion essentielle à la représentation que les Occidentaux ont d'eux-mêmes et de la vie en société, à la différence de la Chine. La démonstration commence avec les origines grecques quand est affirmée la différence radicale entre les Dieux et les hommes: les premiers sont immortels et ont accès à la vérité tandis que les autres sont condamnés à une vie fondée sur l'erreur et le conflit. À cette opposition que reprendront tous les monothéismes s'ajoutent, côté juif, la malédiction divine qui, depuis l'origine, a séparé l'homme du Dieu créateur et, côté chrétien, la complicité de déicide marquée par le triple reniement de Pierre. Les sentiments d'infériorité et de culpabilité qui en résultent sont, pour Ivan Kamenarovic, générateurs d'un rapport à soi et à l'autre vécu comme conflictuel, vraie marque de fabrique de l'Occidental. Les conséquences sont nombreuses, que ce soit le besoin d'une morale en quête d'absolu, la recherche d'une philosophie aux concepts purs pour aider un entendement défaillant ou bien le culte du héros qui doit s'imposer dans des conflits de toutes sortes (duel ar