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Libération
Critique

Le cirque Truss

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Monty Python chez Mrs Dalloway.
publié le 28 juin 2001 à 1h23

Le 18 janvier 1935, Virginia Woolf et sa soeur Vanessa convient le gratin de Bloomsbury à l'unique représentation de Freshwater, une farce écrite par Virginia douze ans plus tôt, en souvenir de vacances bénies passées chez sa grand-tante Julia-Margaret Cameron dans l'île de Wight. Dans les rôles principaux, les membres du clan: Leonard Woolf, Vanessa et Duncan Grant, Adrian Stephen, le frère de la romancière, et les enfants Bell. Puis on oublie Freshwater jusqu'en 1969, date à laquelle on en retrouve le manuscrit à Monk's House, après la mort de Leonard. Publié en 1976, le texte est joué à Paris une seule fois, en 1982, au Centre Pompidou, dans une adaptation d'Elisabeth Janvier, par une troupe d'amateurs parmi lesquels Eugène Ionesco, Jean-Paul Aron et Viviane Forrester... On imagine sans mal que Lynne Truss, l'une des plumes les moins révérencieuses du Times, ait pu s'emparer d'un sujet aussi tentant.

La farce de Woolf, rapide, truffée de private-jokes compréhensibles par les seuls spécialistes du monde victorien, se réduit à l'état de structure d'accueil. Les protagonistes, quant à eux, vont s'épanouir. Tout commence avec l'arrivée chez Mrs Cameron du Pr Dodgson, alias Lewis Carroll, taraudé par le désir de se mêler au plus de gens connus possible, et celui, moins avouable, de traquer les jeunes pêcheuses de crevettes. Nous faisons connaissance d'Alfred Tennyson, l'insupportable poète-lauréat, de son épouse névrosée et de leurs deux fils, puis d'un célèbre phrénologue amér