Les aventuriers d'Italo Calvino ne traversent pas l'Atlantique en solitaire sur planche à repasser, ni le désert en tongues à moteur pour glaner un peu d'attention, ils sont plutôt discrets, ordinaires: soldat, bandit, employé, photographe, voyageur ou myope... Ils vont, comme égarés en eux-mêmes, où leur audace les mène, c'est-à-dire pas toujours bien loin, et en cela nous sont proches. L'auteur décrivait ces nouvelles (Gli Amori difficili, publiées en 1949 à Turin) comme «des récits d'amour et d'absence». «Je crois qu'il se réfère à sa manière à lui d'aimer ses personnages au sens large, et à leur propre absence, ils sont comme entre parenthèses, ils flottent un peu» commente Yan Nascimbene qui vient d'illustrer les textes, discrètement, le trait comme en retrait, parfois dans l'ombre, et malgré cela l'image présente, à la manière d'une photo au moment de se révéler.
Le projet le taraudait depuis plus de quinze ans, car entre l'auteur de Palomar et lui, c'est aussi une histoire d'absence Calvino meurt en 1985 et surtout d'amour: il s'éprend dès l'adolescence de cette «écriture d'orfèvre». «Calvino tourne autour de son sujet, comme un peintre cubiste, il choisit différents angles, je dois respecter cette subtilité, je me place derrière son dos et regarde par-dessus son épaule». Convergence du regard donc, mais aussi affinités géographiques. A Turin où se situent la plupart des nouvelles, Yan Nascimbene passe ses vacances chez sa tante où trône «dans une pièce aux couleur