On dirait que la musique influence directement vos phrases. J'entends un rythme de phrase qui me taraude, je sais que c'est le premier symptôme. Il n'y a pas de signes, pas de mot encore. Quand j'écris, après, il faut que ce soit ça, et ça n'est pas le sens encore, il faut que cela corresponde au rythme que j'ai dans la tête, sinon il n'y a pas de réconciliation avec l'instance intérieure. Le premier signe de l'écriture, en fait, ce n'est pas de la langue qui vient, mais le bruit de la langue.
Mais la musique a un rôle essentiel?
Cela fait partie de ma vie depuis l'enfance. Je crois qu'il n'y a pas eu un jour où je n'ai pas entendu de la musique. Il y avait un piano, j'en jouais, j'en joue toujours, tout le monde jouait chez nous, tout le monde faisait de la musique, tout le monde peignait.
Un des personnages du «Café Zimmermann» constate que la musique a changé son regard.
Un personnage qui n'entendait rien, c'est ce que je voulais. J'avais eu l'expérience troublante de ça, de découvrir chez des adultes qu'ils n'entendaient pas la polyphonie. J'ai essayé de rechercher comment j'entendais quand j'étais enfant, quel amalgame indistinct de sons me parvenait aux oreilles. J'ai essayé de retrouver cette sensation, cette perception de la musique, et retrouver quelle influence pouvait avoir l'accession à l'intelligence esthétique. Je crois que c'est un bouleversement de la personne et du regard sur le monde. Je suis persuadée de ça. Il est vrai qu'il y a des distributions injustes de