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Libération
Critique

Eros c'est la vie.

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Toujours sur la «Ligne de risque», Yannick Haenel s'en prend aux croque-morts de la culture et aux sous-produits romanesques.
publié le 27 septembre 2001 à 0h56

Voilà, en pleine rentrée littéraire, un roman volontiers provocateur, qui nous raconte que toutes les phrases publiées en France sortent du même moule, qu'elles sont fabriquées à la Villa Blanche, une sorte de camp de redressement pour écrivains où sévissent deux croque-morts de la culpabilité et du «malheur d'exister», Madame D. et Monsieur B. «Meilleur livre veut dire ici le mieux vendu» et seuls tirent leur épingle du marasme les petits malins qui, comme l'écrivain Tête d'Os, affichent ce credo cynique: «A une époque de pourriture, il faut des phrases pourries.»

On connaît Yannick Haenel par la revue Ligne de risque qu'il dirige depuis 1997 et où interviennent régulièrement Philippe Sollers et Mehdi Belhaj Kacem. Son compère François Meyronnis avait déjà sonné la charge contre le roman contemporain, il y a un peu plus d'un an, avec Ma tête en liberté (voir Libération du 27/04/00). Le narrateur d'Introduction..., Jean Deichel, s'adresse d'ailleurs parfois au héros de Ma tête..., Simon Malve, et le retour du personnage de Grand Chapeau (Bernard Lamarche Vadel) accentue la fraternité entre ces deux romans. Or, le nouveau numéro de Ligne de risque s'intitule justement d'une phrase de Bataille, «La mort, cette imposture», et se donne pour Ennemi «au sens de Nietzsche» Monsieur B., c'est-à-dire Maurice Blanchot (Madame D. n'étant autre que Duras). On se demande évidemment pourquoi tant de haine. Tout simplement parce qu'à l'époque du nihilisme planétaire, indique Yannick Haenel,