«Ce genre de précocité chez un écrivain aussi jeune fait que la moitié du public se lève pour applaudir et l'autre moitié souhaite juste, comme avec les enfants acteurs d'une autre époque (Shirley Temple, Bonnie Langford...) qu'elle s'asseye tranquillement et qu'elle la boucle.» Au cas où il viendrait à l'esprit de quelqu'un d'écrire ce genre d'amabilités sur Zadie Smith et son roman Sourires de loup, elle a préféré l'écrire elle-même dans une «autocritique» publiée par la revue anglaise Butterfly.
Belle, jeune, brillante, métisse, avant même d'avoir publié son premier roman, Zadie Smith était un phénomène de mode en Grande-Bretagne. Son roman, couvé par l'intelligentsia londonienne, s'est vendu aux enchères, pour la somme non confirmée de 250 000 livres, alors qu'elle en avait à peine écrit cent pages. A sa sortie, il a été récompensé par le prix du Guardian et le prix Whitbread du premier roman, et surtout, last but not least, il a reçu l'imprimatur de Salman Rushdie: «Ce roman, étincelant, raconte comment nous sommes tous arrivés ici, des Caraïbes, du sous-continent indien... et ce que cet "ici" est devenu. C'est un début incroyablement assuré, drôle et sérieux.» Avec beaucoup moins que ça, la moitié du public pourrait effectivement décider de ne pas lire le livre. Ce serait dommage parce que Sourires de loup est un livre étonnant, une saga drôle et intelligente qui se passe à Willesden, dans le nord de Londres, et raconte les histoires croisées de trois familles: l'une