«Je suis absolument enchanté. C'est un éloge inattendu. C'est un grand hommage à l'Angleterre, mon pays, et à l'Inde, pays de mes ancêtres.» C'est en ces termes que V. S. Naipaul a accueilli depuis sa maison de campagne de Salisbury, en Angleterre, la nouvelle. L'attribution du prix Nobel de littérature à cet écrivain britannique n'est pourtant pas une surprise. Son nom revenait chaque année parmi les favoris, à tel point que son éditeur français, Ivan Nabokov, avait fini par ne plus y croire: «Cela fait des années que son nom est cité pour le Nobel», disait-il hier à Francfort où les éditeurs du monde entier sont réunis pour la Foire internationale du livre. «Mais ses amis pensaient qu'à cause de remarques acerbes, notamment vis-à-vis de certains écrivains britanniques, on ne lui donnerait jamais le prix. Généralement, l'académie suédoise décerne le prix à un auteur plus consensuel.»
Intransigeant. Consensuel, le lauréat ne l'est assurément pas. D'origine indienne, né aux Caraïbes il y a soixante-neuf ans, citoyen britannique anobli depuis 1990, sir Vidiadhar Surajprasad Naipaul se perçoit avant tout comme un écrivain anglais et vit à l'anglaise, un argument de plus pour ceux qui l'accusent d'avoir trahi ses origines. De fait, il n'a jamais fait de concessions aux sociétés dont il est issu, qu'il s'agisse du monde caraïbe de son enfance ou de l'Inde de ses ancêtres, mais ne s'est jamais non plus abstenu de critiquer la société anglaise contemporaine. Est-ce