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Libération
Critique

J'irai vous retourner dans vos tombes.

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Sinologue et essayiste, Simon Leys traite ses auteurs favoris Ñ et morts ­ avec un amour vache d'ordinaire réservée aux vivants.
publié le 25 octobre 2001 à 1h22
(mis à jour le 25 octobre 2001 à 1h22)

Simon Leys est un homme seul qui vit ailleurs. Ailleurs, c'est un lieu, l'Australie, et c'est une position, celle d'un «simple lecteur», comme il l'écrit de Gide, posé loin de Paris parmi les calligraphes et les génies morts: la Chine et la littérature sont ses autres antipodes. Ni spécialiste, ni journaliste, ni romancier, le lointain sinologue est une sorte d'amateur éclairé, mordant et distancié. Il compose son cabinet de curiosité littéraire avec un sens du décalage, de l'inattendu, de la non-légitimité agressive. Son précédent recueil d'essais, l'Ange et le cachalot (Seuil), évoquait Simenon, Malraux, Balzac et bien sûr la Chine. L'ensemble était composé d'articles parus dans des revues américaine ou française. Il justifiait ce bric-à-brac intime par ces mots: «Un homme qui tâche d'accorder des anges avec des cachalots doit avoir une vision assez sérieuse de l'univers.» Son nouveau recueil poursuit l'assemblage. Les essais réunis sont consacrés aux vices et vertus des premières (ou des dernières) phrases ronflantes ou inspirées de romans; aux lectures de Don Quichotte par Nabokov, Montherlant, Unamuno et un critique américain, Mark Van Doren, auteur d'un livre qui semble excellent mais qui n'est pas traduit, le Métier de Don Quichotte; à Victor Hugo et à André Gide. Presque tous ont été écrits en anglais pour la New York review of books, puis retraduits en français par l'auteur, qui préfère se trahir lui-même. Ses références critiques sont le plus souvent des biographie