Le livre va surprendre ceux qui ne connaissaient pas le Sollers mélomane, celui qui joue Monk au piano pour les amis, et dit sa fascination pour Miles Davis et Haydn, dans la Guerre du goût. A l'époque de Paradis, on aurait pu le croire beethovenien, cherchant à éclater les formes de la narration traditionnelle, voire straviskien pour son goût des fulgurances. De fait, c'est Bach et Monteverdi, qui donnaient la clé de son oeuvre à venir, comme art de la fugue et système de voix. Pour Femmes, retour choc en 1983 sur la scène médiatique, Sollers s'offrira une ouverture en musique, avant que le Quintette pour clarinette de Mozart ne serve d'hymne, de schibbôleth, de mot de passe, à la société secrète du Coeur Absolu, et enfin qu'hommage soit rendu à Martha Argerich et Clara Haskil, pianistes d'élection avec Passion fixe. Mais ce que Sollers nous dit aujourd'hui, c'est qu'il est mozartien, comme il est casanovien et sadien, par identification non plus avec un héros (comme ce fut le cas pour Picasso), mais des frères gémellaires, des matérialistes hors-la-loi, ayant trouvé l'équilibre enchanté de la raison et de la pulsion.
Le Mystérieux Mozart de Sollers fait donc l'objet d'une enquête. Policière et enjouée, car le romancier suit ses traces, explore les pistes, se met en situation médiumnique. Et métaphysique, car il s'agit d'expliquer l'hérésie fondamentale du Dieu chrétien s'incarnant en jouisseur, d'une félicité ou d'une béatitude qui s'accommode du jeu. Jeu avec les langues,