Ça disparaît souvent, un vieil oncle ou une grand-mère. Les lycéens le savent bien, qui les font mourir chaque fois qu'ils ont besoin de justifier une absence inopinée en cours. Jenny Marx, «Jennychen», n'aurait jamais osé fait une chose pareille à son papa, qu'elle appelait «Old Nick». Et lui non plus d'ailleurs. Ni à son grand-père, le rabbin Marx Halévy, ni à son père Heinrich, bien que celui-ci le trouvât «dominé par une force démoniaque» («ce génie qui t'habite est-il de nature céleste ou faustienne?»), lui reprochât ses «désordres», ses «mornes cogitations à la lueur d'une lampe à huile», le «laisser-aller face au verre de bière» et le «laisser-aller dans une robe de chambre d'intellectuel aux cheveux en broussaille». Pourtant, on ne se privera pas de le faire à son propos. Marx, Karl «Old Nick» Marx, dit encore «le Maure» ou «Steam-engine» (Machine-à-vapeur), détient en effet un record. Non celui d'être parmi les très rares philosophes dont la pensée a véritablement changé le monde. Mais d'être l'homme qui a été le plus souvent déclaré mort et enterré, avec sa bannière, ses enfants, ses petits-enfants et tous ses neveux même éloignés.
Il paraît actuellement, rien qu'en France, des dizaines de livres sur Marx. Des «beaux livres» ou des albums, comme celui de Daniel Bensaïd (Passion Marx . Les hiéroglyphes de la modernité), qui, par le texte et l'illustration, font «revivre» Marx, en ôtant autour de lui «les statues de plâtre au regard vide et le culte qui trop longtemps