Dans la galerie de brutes composant le personnel politique du IIIe Reich, Otto Abetz détonne. Bel homme, ami des arts et des lettres, l'ambassadeur allemand en France de 1940 à 1944 offre le visage réconfortant d'un individu ayant avec sincérité oeuvré à la réconciliation franco-allemande, en s'efforçant de promouvoir une collaboration équi- librée entre anciens ennemis. Pieusement édifiée sous l'Occupation et lors du procès de 1949, cette image ne résiste plus à l'analyse impitoyable d'une jeune historienne autrichienne.
Non qu'Otto Abetz appartienne à la catégorie des nazis fanatiques. Né en 1903, le jeune professeur de dessin n'adhère au parti nazi qu'en 1937. Il construit sa carrière sur la réconciliation franco-allemande avant tout. La multiplication des rencontres entre anciens combattants des deux camps lui vaut, outre un précieux carnet d'adresses, l'image flatteuse d'un expert en affaires françaises qui l'amène à servir, dès 1934, le futur ministre des Affaires étrangères Ribbentrop. Mais sa partialité en faveur des thèses allemandes conduit le gouvernement français à exiger son retour en juin 1939. Abetz ne pardonnera jamais cette expulsion dont il se vengera en facilitant le meurtre de Georges Mandel en 1944.
La défaite de la France, en 1940, ouvre à Otto Abetz les portes du pouvoir. Les historiens ont longtemps considéré l'ambassadeur comme un aimable dilettante se contentant d'animer la vie culturelle du tout-Paris: Barbara Lambauer détruit cette légende. Abetz a