A la «mégalomanie humaine», auraient été apportés au cours de l'histoire trois grands «démentis», selon Freud. Celui que l'inventeur de la psychanalyse a fourni lui-même (le sujet n'est pas dans sa conscience comme un roi dans son royaume), celui donné par Copernic (la Terre n'est pas le centre de l'univers) et enfin celui qu'a infligé Charles Darwin (l'origine animale de l'homme). Que l'homme n'ait pas une place particulière dans la nature n'a pas été aisément accepté, comme l'attestent évidemment les résistances opposées aux théories de l'évolution. La réception du petit ouvrage de Darwin, l'Expression des émotions chez l'homme et les animaux qui reparaît chez Rivages-Poche en est aussi l'illustration. Paru en novembre 1872, le livre a eu un succès public immédiat. Il s'en est vendu en deux mois beaucoup plus que dans les vingt années suivantes. Sur un malentendu, probablement: le mot «émotion», figurant dans le titre, a dû faire palpiter quelques coeurs romantiques, et le traitement scientifique qui en était proposé vite refroidir les enthousiasmes. De fait, alors que l'Origine des espèces (dont la première édition, en 1859, est épuisée... en un seul jour!) continuera pendant un siècle à susciter des controverses, l'Expression des émotions est passé sous silence par les savants, parce que s'y trouvaient refusés les présupposés de la physiognomonie alors dominante, et, si on peut dire, «refoulé» par le public, parce qu'il mettait hors jeu la conception de l'«esprit» co
Darwin pense-bêtes
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par Robert Maggiori
publié le 3 janvier 2002 à 21h34
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