Menu
Libération
Critique

Catégorie lourd-léger.

Article réservé aux abonnés
Un conte adolescent de Michel Rio, avec marginal, dandy et coktails.
publié le 31 janvier 2002 à 21h52

Il y a des écrivains qui sont là et d'autres qui sont ailleurs. Michel Rio n'est pas là, mais où est-il? Cela dépend des livres. L'orgueilleux petit Prince voyage seul de planète en planète, c'est sa consigne. Ces planètes sont exiguës, hors du temps, des modes, de la réalité. Avec la Remise au monde, Rio se fait simplement plaisir: il trousse un conte philosophique léger, immature, invraisemblable, qui se lit vite et bien, où les adultes parlent comme des adolescents attardés, pleins d'idées fraîches, de culture et de lieux communs. Le peintre James Badon, dit Brush (presque comme Bush, mais aussi tout comme brush, la brosse de l'artiste), vit en Californie dans une roulotte au bord de la mer. L'étiquette «marginal sympathique» clignote comme un néon. Brush a peint en camaïeu 104 toiles, des merveilles semble-t-il, qu'il n'a jamais montrées ni vendues à personne: c'est un rétentionniste paisible et mélancolique. Un jour, en pêchant, il accroche Jérôme Avalon, un écrivain qui n'écrit plus, mais qui a tenté en vain de se noyer, «comme Martin Eden»: le héros de Jack London s'enfonçait à la dernière page dans l'océan au point d'être sûr de ne jamais remonter, et son histoire devint immortelle. L'étiquette «dandy flottant» clignote sur Avalon également comme un néon. Son amitié avec Brush va les bouleverser l'un et l'autre. Avalon, défiant et ironique envers la vie, réapprend à aimer, à se mouiller plutôt qu'à se noyer; Brush, à ouvrir sa remise. Bref, ils se remettent au monde.