La méthode Germaine Greer est celle du pavé dans la mare. On peut l'apprécier pour ses effets salutaires: la prise de conscience en accéléré des problèmes vilipendés. On peut y être allergique à cause de ses dénonciations coups de poings qui laissent KO le lecteur, alors inapte à s'interroger sur le bien-fondé des colères généreuses de l'auteur. On ne peut lui reprocher d'abuser de la recette, nécessairement génératrice de polémiques: deux pavés en trente ans, c'est peu. Il s'agit de la même pierre et de la même mare: un lancer féministe radical, version seventies et anglo-saxonne, dans les eaux calmes et profondes de la domination masculine. Germaine Greer avait pourtant bien cru que son cri serait suffisant pour que la Femme eunuque (son best-seller de 1971), mutilée par le sexisme, devienne «entière». Contrairement à ce que suggère le titre de son nouvel ouvrage, la femme du XXIe siècle n'est, selon elle, entière qu'en apparence; ce faux-semblant aurait assoupi les féministes, bercées par une mélodie fredonnant la libération des femmes et l'égalité en droits. L'acte d'accusation de Greer, professeur de littérature comparée en Angleterre, dépasse le Backlash de Susan Faludi (1991), dénonçant la réaction antiféministe américaine: plus que d'une régression, les femmes sont victimes d'un durcissement du patriarcat, efficace en ses nouveaux habits. Greer accuse: «Le post-postféminisme se résume à la figure de la salope provocante et fière de l'être.»
Toute l'analyse repose sur