Tout est exceptionnel, chez Ludwig Wittgenstein, ce qu'il a écrit, ce qu'il n'a pas écrit ou publié, ce qu'il a été, ce qu'il aurait voulu être. Il jouait de la clarinette, sa soeur Hélène était une merveilleuse musicienne, son frère Hans un petit Mozart, son frère Paul un pianiste célèbre (il perdit un bras à la guerre et Ravel lui dédia le Concerto pour la main gauche), la maison de son père (magnat de l'acier) était fréquentée par Brahms et Mahler, mais lui, Ludwig, ne devint pas le chef d'orchestre qu'il rêvait d'être. Il renonça aussi à se faire moine, à devenir psychiatre et à émigrer comme manoeuvre dans l'Union soviétique de Staline. Il est devenu finalement l'un des plus grands philosophes du siècle. Il a occupé la chaire de philosophie et de logique à Cambridge, mais il a fait des études d'ingéniérie à Berlin et d'aéronautique à Manchester, a projeté des cerfs-volants météorologiques, construit des moteurs à réaction, a été un temps ermite dans un fjord norvégien, héritier d'une immense fortune (à laquelle il renonça), mécène d'artistes fauchés (dont Rilke), combattant volontaire de l'armée austro-hongroise, prisonnier de guerre en Italie, aide-jardinier dans un couvent de Hüttendorf, maître d'école dans des villages de Basse-Autriche, architecte (on peut encore admirer à Vienne l'édifice qu'il bâtit pour sa soeur Gretl, modèle de Klimt, patiente et amie de Freud), étudiant en philosophie à quarante ans, serveur dans une cantine, portier, brancardier au Guy's Hospi
Critique
La classe de Wittgenstein.
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par Robert Maggiori
publié le 7 mars 2002 à 22h31
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