Primo Levi s'est suicidé voilà quinze ans, mais il continue de neiger des inédits. Plus le temps passe, plus ils sont brefs, de bric et de broc, plus ils sont accompagnés de commentaires, essais, préfaces, postfaces, qui font de la postérité du grand auteur italien un petit conte par lui-même. Jusqu'à quand? Ces inédits tiennent-ils une fois tombés sur la page ou s'agit-il de fonds de tiroir? Deux recueils de nouvelles permettent de faire le point sur ce phénomène de Lévitation éditoriale. Le premier livre, chez 10/18, regroupe des nouvelles et de brefs dialogues entre un journaliste et un animal, des Histoires naturelles sans rapport avec celles de Jules Renard, publiés dans les journaux italiens, de 1949 à 1987. La dernière His toire naturelle est parue dans La Stampa le 26 avril 1987, quinze jours après la mort de son auteur. C'est la brève interview d'une araignée, qui accepte de répondre si on lui donne des mouches et se demande si une interview est comestible, puisque pour elle, «le monde se divise en deux: les choses qui se mangent et les autres». Comme dans les dialogues avec la girafe ou le goéland, on retrouve la simplicité didactique de Levi et, dissimulé sous la fantaisie, son esprit scientifique (rappelons qu'il était chi miste). Ces dialogues ont cependant peu d'intérêt. Le texte-titre, en revanche, est remarquable. C'est une nouvelle métastase des souvenirs de Levi au camp d'Auschwitz-Monowitz. Il y conte comment, un jour, une Allemande lui demanda gentiment d
Critique
Levi sans trêve
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par Philippe Lançon
publié le 21 mars 2002 à 22h40
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