Il arrive qu'il y ait pire que l'ennui, la vacuité et la vanité de la vie de bureau. Il y a la vraie vie, qui parfois se retrouve tellement vidée de désirs, d'ambitions et d'êtres humains que même l'enfer structuré et policé du bureau est préférable.
C'est ce que semble nous dire Une époque formidable, et c'est en tout cas le postulat de ce court roman bureaucratique et londonien, dont la première phrase est : «Le travail est une bénédiction.»
Michael Bracewell est un critique culturel britannique. Depuis 1988, il a aussi écrit six romans dont le mythique The Conclave sur les yuppies des années 90. Une époque formidable, premier de ses romans traduit en France, raconte la vie au travail d'un cadre moyen d'âge moyen qui, plus jeune, a rêvé d'être dandy et ethnologue urbain. Faute d'y être parvenu, faute sans doute d'avoir essayé, le narrateur nous parle de ses collègues de la City, de son train de banlieue et de son pub «aux moquettes noircies et poisseuses», autant d'endroits où les rencontres sont pénibles ou agréables, mais toujours subies, inabouties et un peu absurdes.
Une époque formidable pourrait simplement être la chronique drôle et dépressive d'une vie au bureau si Michael Bracewell n'avait pas, justement, un oeil acéré d'ethnologue urbain, qui rappelle un peu Martin Amis, la méchanceté en moins.
Entre Clapham Junction, l'endroit où le 07 h 57 ralentit, et la gare Victoria, celui où il s'arrête, le cadre moyen a le temps de considérer «notre petit agrégat d'humanité, no