Dans son enfance, il avait reçu un porte-plume dans l'oeil. Cela ne le rendit pas aveugle, mais voyant. Olivier Larronde, né à la Ciotat le 2 août 1927, est mort à Paris centre le jour des morts de 1965, alcoolique et demi-clochard, laissant après lui trois livres de poèmes dont le génie, tel Orlando, enjambe les vers et les époques. A la fin, Larronde vivait avec sa guenon, baptisée «ça ira». Elle devait lui rappeler que tout poème est une révolution miniature et que son roi préféré, Louis XI, était grand amateur de ménagerie et porte de la Renaissance.
Larronde avait été célébré par Cocteau (qui, faisant le coup de Gide à Proust, lui avait d'abord dit qu'il ferait mieux de cesser d'écrire), Genet (qui insulta Cocteau parce qu'il n'avait pas d'emblée senti le génie du tout jeune poète), Giacometti, Louise de Vilmorin, Jean Cau, Mandiargues. La mort à 14 ans d'une soeur brillante qu'il aimait d'inceste ; de violentes crises d'épilepsie ; une addiction à l'opium pour s'en soulager ; enfin la noyade dans le vin rouge, comme pour mieux finir dans le nid bordelais familial : tout cela le conduit au silence et la mort, sur un lit aux draps sales, tête face au mur. Deux jours plus tard, Michel Leiris écrit : «Le vrai poète fait métier de brasser vie et mort dans le même creuset, et c'est pourquoi il est toujours si menacé. Très malheureusement malgré l'or qu'il nous lègue, Olivier Larronde semble avoir eu pour vocation de nous le confirmer.»
L'or qu'il nous lègue, c'est d'abord aujo