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Libération
Critique

Au périph de leurs vies

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Dominique Fabre trace en pointillé les vies minuscules d'un quartier à la lisière de Paris.
publié le 22 août 2002 à 0h43

Un bout d'Asnières, guère loin des gares de Bécon et de Bois-Colombes. Un monde en périphérie, à quelques kilomètres de Paris. Mais le centre du monde tout à fait pour les habitants de ce quartier, qui se croisent, s'emboutissent lentement la vie l'un l'autre parfois, avec «au-dessus le soleil qui joue à chat perché sur les sommets d'immeubles où il y a les plus petits appartements pour démarrer la vie, employés récalcitrants à l'embauche à durée indéterminée et jeunes gens désargentés». Il y a aussi la grande maison qui craque, près du terrain vague, «vraiment le bout du quartier», où vit la fille du dentiste, que le jeune homme n'aura pas. Il y a le Centre, ce café, avec ce garçon de café, vieux garçon de 53 ans, qui «connaît tout un tas d'histoires, sauf la sienne en fait, on ne trouve personne à qui la raconter». Il surveille la gare à 18 h 12, d'où ne sortira plus cette femme qu'il a perdue, qu'il a décidé de perdre, des années plus tôt. Alors il choisit des «parties de comptoir très luisantes. C'est comme si on pouvait nettoyer toutes les ardoises de sa vie à toutes les heures du jour ou de la nuit, avec un torchon, pour boire un verre à la santé de tout cela». Croit-il, mais ce qu'il voit lorsqu'il regarde son zinc, ce comptoir miroir, ne lui plaît pas.

Dans le quartier, on trouve des vieilles femmes qui ont «le bourdon depuis le décès de leur mari». Des jeunes couples qui emménagent dans leur premier appartement, sous le regard discrètement envieux de leurs amis. Au C