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Libération
Critique

La maison de Corrections

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Comment va la middle class américaine? La réponse du romancier Jonathan Franzen est nuancée. Il croit trop à l'irréductibilité de l'individu pour apprécier le marché de l'optimisme à tout prix. Rencontre .
publié le 22 août 2002 à 0h43
(mis à jour le 22 août 2002 à 0h43)

Vers le milieu du roman, Alfred tombe ­ accidentellement ou volontairement on ne saura pas ­ d'une hauteur de dix mètres dans l'Atlantique, pendant la croisière où sa femme Enid l'a traîné, dans une pénultième tentative (il y aura aussi le dernier Noël en famille) pour mener une vie de couple et une vie de famille normales, ils ont tous les deux près de 75 ans.

Pendant qu'il voit défiler verticalement les hublots et les ponts du bateau, il se souvient des soirs où il lisait des histoires à ses enfants, «douces soirées de doute entre les nuits de lugubre certitude. Ils lui revenaient à présent, ces contre-exemples oubliés, parce qu'à la fin, quand on tombait dans l'eau, il n'y avait rien de solide à quoi se raccrocher, sinon ses enfants». Que, de leur côté, ses trois enfants aient essentiellement le souvenir d'une maison soumise à sa froideur et à sa tyrannie n'est finalement qu'une preuve supplémentaire du malentendu fondamental qui afflige la famille Lambert dans les Corrections.

Avant ce roman, Jonathan Franzen en a publié deux autres (The 27 th City, 1988, Strong Motion, 1992, non traduits en France) qui ont reçu un bon accueil critique. Mais si ce romancier de 43 ans est aujourd'hui connu dans son pays, c'est surtout à cause du différend qui l'a opposé à Oprah Winfrey, la présentatrice vedette d'ABC, peu après la sortie des Corrections, et qui lui a valu de se faire traiter d'«ingrat», de «sale gosse» et de «petit con» (voir encadré). Sans dommage évident pour la carrière