Le faubourg Saint-Antoine est un des lieux symboliques des soulèvements du peuple parisien en 1789 et en 1848. Les historiens ont même longtemps considéré que la vie de ce faubourg préfigurait la Révolution puisqu'il possède depuis le XVIIe siècle un privilège exceptionnel : on peut y travailler librement, en dehors du système corporatif et de ses règlements très contraignants, alors que pour la plupart des sujets royaux, cette liberté du travail ne viendra qu'en 1791 avec les lois d'Allarde et Le Chapelier.
Le faubourg connaît un bel essor au XVIIIe siècle. Cette liberté en effet, attire toutes sortes de gens, en particulier les artisans protestants qui peuvent ainsi travailler sans renoncer à leur foi, mais aussi beaucoup de provinciaux et d'étrangers qualifiés qui sont par force dépourvus de lettres de maîtrise. Le quartier acquiert ainsi dès le XVIIIe siècle l'image d'un espace ouvrier et populaire dont les élites parisiennes redoutent les débordements même si les agitations y sont plutôt rares, ces peurs relevant plus, comme bien souvent, du fantasme que de la réalité. C'est pour expliquer cette marginalité contrôlée et finalement bien peu subversive qu'Alain Thillay s'est livré à une recherche impressionnante par son ampleur sur les archives assez dispersées qui restent de ce quartier. Reconstituer un corpus de plus de 2500 artisans entre 1690 et 1776 lui a permis de suivre au plus près les jours et les nuits de ce peuple laborieux.
Il montre comment le faubourg est en f