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Libération
Interview

«Il déstabilise les oppositions trop simples»

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Michel de Certeau a traversé tous les champs des sciences humaines. Entretien avec son biographe, François Dosse.
publié le 12 septembre 2002 à 0h57

Situer Michel de Certeau, est-ce d'abord dire qu'il était jésuite ? Entré dans la compagnie de Jésus en 1950, il n'en est pas sorti, et est toujours resté fidèle à cette appartenance. Le rapport à l'institution, quelle qu'elle soit, était faible chez lui, mais il tenait à son identité de jésuite, sans s'autoriser d'elle pour faire acte d'autorité. Deux raisons le conduisent, à vingt-cinq ans, chez les jésuites : d'une part son désir d'ailleurs, de partir en mission en Chine. C'est en effet l'époque où la Province de Paris de la Compagnie est appelée «Paris-Shanghaï», tant était grand le nombre de jeunes jésuites à vouloir renouer avec cette tradition. En second lieu, Certeau entretient un rapport privilégié à Lyon, où il est en formation, avec celui qui incarne la «nouvelle théologie» de Fourvière, le jésuite Henri de Lubac dont le rayonnement est tel dans l'après-guerre qu'il fait ombrage à Rome, qui décide de l'interdire d'enseignement. Henri de Lubac fait de Certeau son fils spirituel et le conduit sur les voies de la patristique et de l'exploration des mystères du Corpus mysticum. En 1956, dans le cadre de la revue et de la collection Christus, Certeau participe aux côtés de Maurice Giuliani et de François Roustang au travail de retour sur les débuts de la spiritualité ignatienne. A partir de 1967, il devient un collaborateur très actif de la revue Etudes. Cette appartenance à la Compagnie est à la base de ses premiers travaux de recherche, d'abord sur un compagnon d'Ign