Quatre points de vue se partagent le nouveau roman de Pavel Hak, Sniper. Le tireur embusqué tire sur ce qui bouge. Il dit : «Je participe à ce conflit pour éliminer cette anomalie porteuse de paroles insensées qu'est l'homme.» Les habitants des villages sont regroupés, les cadavres sont emportés «à l'abri des regards». Au Quartier général, le commandant très content briefe ses officiers : «Matraques, couteaux, empalement, battes de base-ball, décharges électriques, cellules frigorifiques, tout servira notre action : bafouer les Droits de l'homme est notre but ! Et ce but ne sera jamais atteint si les femmes ne sont pas réduites en esclavage !» Attaquant la terre gelée, un homme creuse, «à la recherche des morts». La guerre va son chemin, est-il possible de survivre, résister, respirer ?
Sniper, qui évoque la Yougoslavie, est écrit au présent. Il est relativement aisé de lire les pages où s'exerce la violence à distance, et celles où le survivant arrache les siens à la fosse commune. Comment ne pas comprendre que regarder ces morts est déjà une victoire sur les assassins ? Mais ce que Pavel Hak nous invite à regarder, c'est plus que ça, c'est la terreur des fuyards, et encore davantage, c'est la torture, et la jouissance des bourreaux.
Pavel Hak, silhouette juvénile, visage fin, est né tchèque en 1962. Il est arrivé il y a une quinzaine d'années en France. Son premier roman, Safari, situé dans l'Afrique postcoloniale, était d'une obscénité et d'une sauvagerie insensées. Sniper