Normalement, les perroquets kéas de Nouvelle-Zélande sont très gentils : des clowns qui jouent sans cesse, font rouler des pierres, cabriolent, dansent ensemble en exécutant des petits sauts en face à face. Ils sont espiègles, et manifestent un goût certain pour les plaisanteries et les situations cocasses. C'est ainsi, du moins, que ces paisibles mangeurs de miel et de fruits ont toujours été décrits. Voilà maintenant qu'ils sont devenus des terroristes urbains : ils démontent frénétiquement les voitures pièce par pièce, transforment les antennes de télévision en sculptures abstraites, brisent la vaisselle, détricotent les tentures, s'attaquent aux moutons et leur dévorent les reins au point que les éleveurs ont mis leur tête à prix (3 shillings). Mais un animal, indépendamment de l'évolution biologique de l'espèce, est-ce que ça change, de caractère, d'«esprit», d'organisation sociale ? Tel est le point de départ de l'ouvrage de Vinciane Despret, philosophe et psychologue, dont le titre, Quand le loup habitera avec l'agneau, se réfère à l'annonce prophétique faite par Isaïe (XI, 6) d'une nature réconciliée avec elle-même, dans laquelle «la panthère se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront ensemble» et «le nourrisson s'ébattra sur le trou du cobra»..
Les babouins n'étaient-ils pas les parfaits représentants d'une société «machiste», rigidement hiérarchisée, dans laquelle les mâles se battaient sans cesse entre eux pour la possession des femelles passives