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Libération

Mythologie de Barth

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publié le 19 septembre 2002 à 1h03

Ce livre est très gros. Trop ? C'est vrai que c'est incommode de le lire tellement il est lourd (près de 800 pages grand format) mais on aurait encore plus reproché à l'éditeur d'opérer des coupes. Quant au long texte lui-même, il est aussi plein de légèreté. John Barth, né en 1930, a publié ce roman en 1960. C'est l'histoire, à la fin du XVIIe siècle et écrite dans une fausse langue de l'époque, d'un poète puceau anglais envoyé dans le Maryland. Le livre pourrait difficilement être court vu qu'il fonctionne un peu sur le principe de Don Quichotte ou de Tristram Shandy, qu'il joue de manière quasi contemporaine avec les anciennes règles du roman-fleuve picaresque pour réinventer la naissance des Etats-Unis. Il n'y a pas de premier degré. La quatrième page de couverture de la traduction française est d'ailleurs fidèle à cet aspect de l'oeuvre, puisqu'elle dit du Courtier en tabac qu'il est «considéré comme le chef-d'oeuvre de John Barth», et de John Barth qu'il est «considéré comme le père du post-modernisme et l'un des plus grands romanciers américains vivants». Mieux que ce qu'on est, il y a comment on est considéré. C'est une idée américaine que les chefs-d'oeuvre romanesques sont gros. Dans son Histoire de la littérature américaine (Fayard), Pierre-Yves Pétillon dit en outre une raison supplémentaire pourquoi ce livre est «énorme» : «John Barth l'a voulu assez épais pour que le titre puisse en être imprimé sur la largeur de la tranche» (le titre original est The Sot-Weed