Un singulier mélange d'obsession puritaine et d'exhibitionnisme pour ainsi dire viscéral a contraint Christopher Isherwood, dès ses années de collège à Cambridge (1923), à tenir un journal intime qui n'a, par la suite, cessé de nourrir son oeuvre. Et ce n'est évidemment pas un hasard si les sommets de celle-ci sont ceux où affleure et se déploie cet examen nombriliste (Un homme au singulier en est un remarquable exemple), parfois doublé, comme c'est le cas dans Christopher et son monde, d'un décryptage fascinant de ses textes antérieurs. Ce qui n'empêcha pas le brillant jeune romancier de Tous les conspirateurs (1928), porté en son temps sur les fonts baptismaux de la nouvelle fiction anglaise par Virginia Woolf et E.M. Forster, de douter de lui-même, au point de confier à son diary, à la date du 5 juin 1958 : «Qui es-tu, toi qui écris ceci ? Pourquoi écris-tu toutes ces choses ? Est-ce de la compulsion, ou un alibi pour montrer ta désapprobation du crime que tu portes en toi ?» Les lecteurs d'Adieu à Berlin, publié en 1939 soit dix ans après le premier séjour d'Isherwood en Allemagne, et au moment où il venait de prendre la décision de s'exiler définitivement en Californie , comprendront beaucoup plus tard la nature véritable des tourments de l'écrivain, apaisé par sa découverte du Vedenta et la pratique d'une homosexualité affirmée loin de son asphyxiant pays natal...
Mais, bien avant l'expérience berlinoise, déterminante tant sur le plan personnel que sur celui de la li