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Portrait

Candide

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Nicolas Jones-Gorlin, 30 ans, fait face difficilement aux censeurs de «Rose bonbon», son roman sur la pédophilie.
publié le 17 octobre 2002 à 1h26

A l'abord, il y a chez lui un côté enfant apeuré, petit animal traqué. Cela tient à la fois à sa nature, secrète, inquiète, et aux circonstances. Nicolas Jones-Gorlin, écrivain inconnu, est devenu la cible des censeurs pour avoir écrit Rose bonbon, roman où monologue un pédophile.

Rendez-vous chez Gallimard, son éditeur. A l'accueil, il faut répéter trois fois son nom pour qu'on le fasse chercher. On quitte des lieux qui semblent loin d'être terrain conquis. Sweat-shirt gris à capuche façon ET, sac à dos maigrelet, silhouette fantomatique et preste. Il a faim. Même dans le bistrot, l'environnement résiste. Le serveur lui refuse ses aises, lui déconseille la carafe d'eau «trop javellisée», et le bat froid quand il ne commande qu'un croque-monsieur. Comme si la société du réel, bête et grasse, s'était donné le mot pour s'acharner sur un imagineur de fictions qui a l'habileté d'aller fouiller les reins des névroses du moment mais qui, jamais, n'aurait pensé déclencher une agressivité aussi sommaire. Il faudra un moment pour que, sous la voix gentillette et l'angoisse latente, sous le refus très trentenaire de la provocation et de la revendication, perce un goût corrosif pour l'ironie et le sarcasme.

D'abord, son rapport à la pédophilie. Puisqu'il faut bien en passer par là. Puisqu'en ces temps de récits nombrilistes le pays bêta finit par croire que, quand l'auteur dit «je», il ne peut s'agir que d'une expérience personnelle. La pédophilie, donc, même si les moeurs supposées d'un