Une nuit de Thanksgiving, à New York, deux frères s'essaient à tuer le temps avec un appareil photo. Derrière l'objectif se tient Mario, le plus grand des Sorrenti, aujourd'hui photographe de mode reconnu. Devant l'objectif, voici Davide, torse nu, royalement allongé sur son lit, beau comme un ange pasolinien avec sa cicatrice qui lui barre le bas-ventre comme un trophée de chasse. En 1997, quatre ans après ce rendez-vous nocturne, Davide mourra des suites d'une grave maladie génétique et de sa toxicomanie : il avait 20 ans.
The Machine détaille en quatre pellicules couleur, soit 95 photographies, ce tête-à-tête privé. Hors champ, il y a aussi l'autre, «la machine», celle qui aide Davide à synthétiser son sang depuis l'âge de trois ans. Autant dire que «la machine» fait partie de la famille Sorrenti et que chacun s'efforce de l'oublier en soulageant le quotidien du jeune malade, Mario le premier.
C'est bien évidemment la vie qui surgit tout au long des portraits, comme si l'aîné cherchait à irriguer chaque coin de peau de Davide, à lui transfuser dans chaque veine une lumière qui le rendrait invincible. Immortel ? «N'en fais pas trop», semble lui répondre Davide, jouant avec son frère au chat et à la souris, sans jamais esquisser le moindre sourire. Mais même quand il grogne et tire la langue, Mario réussit à capturer sa grâce de troubadour égaré parmi des couleurs fluorescentes qui dessinent autour de lui comme des ailes de papillon. D'ailleurs, à la dernière image de The Mac