Longtemps, le club assez fermé des baby-boomers fascinés par la bande dessinée belge des années 1950-60 s'est délecté du véritable bouillon de culture histori que et romanesque dans lequel baignaient les grands chefs-d'oeuvre d'un genre hybride longtemps épargné par la critique. Comme on sait, la lecture hallucinée de la Marque jaune a façonné de jeunes anglophiles, celle du Mystère de la grande pyramide ou du Temple du soleil présidé au destin d'archéologues, pour ne rien dire des effets d'On a marché sur la lune.
A l'orée des années 1990, une rumeur diffuse se mit à circuler dans le cercle encore plus restreint des spécialistes du comics belge, évoquant le rôle qu'aurait joué après la guerre un incivique notoire du nom de Jacques Van Melkebeke, dont on retrouvait la trace, sous le sobriquet de «l'ami Jacques», dans le livre de souvenirs de Jacobs, l'Opéra de papier. «By Jove !» Les choses en restèrent là jusqu'à ce qu'un jeune historien de la BD, déjà auteur d'un livre d'entretiens avec Greg, décide d'aller fouiner dans les archives bruxelloises à la recherche de réponses à la lancinante question à nouveau posée dans la biographie d'Hergé (1996) de Pierre Assouline. Il nous propose aujourd'hui un rapport circonstancié, sous la forme d'une évocation à la fois de la vie et du rôle du très curieux Van Melkebeke (1904-1983).
Orphelin de père, élevé dans le bistrot de son beau-père au coeur du quartier très populaire des Marolles, à Bruxelles, dans une ambiance pittoresque et un