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Libération
Critique

Lésions dangereuses

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«Fanfare», les associations d'idées d'Emmanuel Adely.
publié le 24 octobre 2002 à 1h31

N'importe quel lecteur, fût-il fondu de théâtre, ne peut que comprendre Fanfare, ressentir d'entrée de jeu dans toute son âme et son corps l'inconfort de la situation et s'agiter sur sa chaise. Voici un malheureux que «M.», qui l'aime, traîne à une adaptation des Liaisons dangereuses, une lecture, plutôt, c'est plus chic, par deux comédiens réputés, avec un pianiste pour interpréter Danceny, le jeune homme qu'aime Cécile Volanges, plus exactement pour interpréter Bach. Mais est-il sûr d'aimer toujours Bach, ce malheureux tout juste arrivé d'Egypte, et cueilli à l'aéroport par «M.», les jambes rongées de furoncles, aspirant à être n'importe où sauf ici, dans une loge de théâtre à l'ancienne ?

Il n'est pas sûr de lui, ni de ses émotions. Il aurait fallu dire non. Il faudrait partir. «Me lever, quitter ce décor surchargé d'angelots, de lustres, de musée, un décor de musée, avec des gens en figurants et chaque fois je redeviens figurant à mon tour, je ne joue pas ma pièce. Quelle pièce. Je n'en peux plus me suis-je dit dans une nervosité absolument injustifiée, et excédé par moi-même.» Cette nervosité, cette exaspération toute bernhardienne, permet à la pensée de circuler, de sauter du coq à l'âne, de convoquer le souvenir et de le juxtaposer à la scène présente. Elle est une bonne manière, chez maint jeune romancier français, de renouveler le monologue intérieur. Elle est, pour Emmanuel Adely, une forme naturelle, musicale. Le finale sera libérateur.

Pendant que s'égrènent les me