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Libération
Critique

Pajak, la vie dessin.

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Frédéric Pajak, auteur de livres dessinés loin de la BD, propose une nouvelle collection de «Cahiers dessinés» et une revue du même métal.
publié le 24 octobre 2002 à 1h31

C'est tout simple : Pajak, on ne l'avait pas cru. On l'avait rencontré sans le vouloir, sans le regretter non plus, au contraire, on l'aimait bien, on avait admiré l'Immense Solitude, cet étrange ouvrage de texte et de dessins (PUF, 1999) qui racontait Nietzsche, Pavese, De Chirico, tous ces gens qui meurent ou deviennent fous trop jeunes à Turin, un livre sur les autres qui commençait par un accident de voiture, une DS 21, son propre père à lui, Pajak, mort à 35 ans, trop jeune pour tout, surtout pour mourir. On serait bien incapable de remettre les pieds à Turin sans penser à Pajak, à Primo Levi. Mais, ce soir-là, quelque part en Suisse où vivait Pajak qui détestait y vivre, un plan de table raisonné avait installé entre nous une jeune femme qui préférait danser quand nous avions choisi de boire consciencieusement du vin rouge, le dos raide et la nuit devant nous. Pajak, avec un nom pareil peu de gens l'appellent Frédéric, Pajak sait boire et sait ce qu'il veut. Cette nuit de Saint-Sylvestre, Pajak voulait faire ces Cahiers dessinés, il disait qu'il avait tout en tête, qu'il ferait une revue consacrée au dessin, qu'on en avait assez de rire aux gribouillis et d'admirer la peinture, de ne considérer le dessin qu'au service d'un texte, d'une idée, comme un brouillon censé préparer mieux, comme la caricature de lui-même ou des autres, qu'on le tolérait pour qu'il nous fasse rire, et que lui, le dessin, ça le faisait pleurer, des trucs comme : «Je n'ai rien contre la BD mais j