«De ma fenêtre (1er décembre 1976), je vois une mère tenant son gosse par la main et poussant la poussette vide devant elle. Elle allait imperturbablement à son pas, le gosse était tiré, cahoté, contraint à courir tout le temps, comme un animal ou une victime sadienne qu'on fouette. Elle va à son rythme, sans savoir que le rythme du gosse est autre. Et pourtant c'est sa mère !» La domination, l'autorité, la violence, la contrainte, se nichent décidément n'importe où, même dans la foulée d'une maman qui, pressée, presse, force et fait pression. Est chef en effet qui est maître du pas, qui met au pas, mais va son train, à sa cadence. «Le pouvoir la subtilité du pouvoir passe par la dysrythmie, l'hétérorythmie». A l'inverse, est-il possible d'«aller de concert», de «consonner», de respirer ensemble ou «conspirer», de convivre, de telle sorte que la «communauté» ait sa musique mais respecte le rythme de chacun ?
Telle est la question que Roland Barthes a, sinon traitée, du moins identifiée, circonscrite, déclinée en toutes ses ramifications dans le cours qu'il tint au Collège au France de janvier à mai 1977. C'est sur proposition de Michel Foucault que, quelques mois auparavant, l'assemblée des professeurs l'avait élu (à une seule voix de majorité) dans la prestigieuse institution, à la chaire de sémiologie littéraire. Il avait été lecteur de français en Roumanie, au Maroc et en Egypte, chercheur en lexicographie et sociologie au CNRS, puis avait donné des cours de sémiotique