Dans le salon de son HLM, où les inévitables émissions nipponnes du mercredi regroupent les enfants autour de la télévision, Dialiba Konaté tient à se présenter. Il dit d'abord où il est né : au Sénégal, puis d'où il vient : le Mali. De là, il évoque son grand-père maternel, un Dialo d'origine princière, «un grand copain d'Hampaté Bâ», qui fut le secrétaire du premier gouverneur du Burkina Faso, et sans qu'on y prenne garde, remonte doucement le fil du temps. Jusqu'à nous faire basculer dans un monde d'autant plus déroutant qu'il ne se départ jamais du ton enjoué de celui qui raconte une bonne journée. Les digressions historiques sont parfaitement maîtrisées, et s'il émaille le récit d'innocents «où j'en étais ?», il le reprend toujours exactement où il l'avait laissé. Les digressions participent de la présentation.
On comprend ainsi que dessiner, pour cet artiste africain, est sa manière à lui de tracer des liens entre un passé enfui et un présent imparfait. Une manière de ne pas perdre pied.
Quand il retourne vivre au Mali après la mort de son père et les traditionnelles épousailles de sa mère avec le frère de celui-ci, il est encore enfant, mais déjà les récits des anciens le passionnent, «les mots me fascinent» dit-il encore aujourd'hui, ceux des griots en particulier qui en ont le secret. Aussi, les lendemains de veillées, comme les mots n'étaient pas tombés dans l'oreille d'un sourd et encore moins d'un manchot, ressortent-ils croqués par ses soins aux détails musculaire