L'auteur de Coeur double n'aurait pas manqué d'ironiser sur la parution simultanée de deux éditions de ses oeuvres. Chez Phébus, Sylvain Goudemare propose l'essentiel de Marcel Schwob. Aux Belles-Lettres, une équipe d'universitaires offre une édition «quasi complète». Ces deux publications apportent leur lot d'inédits, et sont remarquablement présentées. Que les allergiques à la note de bas de page se rassurent, il y en a peu, certains le regretteront. Guest star : l'actrice Marguerite Moreno, épouse «adorée» de l'écrivain dont Phébus réédite les mémoires (1).
Marcel Schwob reste l'exemple de l'écrivain pour happy few qu'on protège jalousement de tout commerce avec le philistin. On ne peut que se réjouir qu'on lui rende enfin sa place, l'une des premières, auprès d'Alfred Jarry ou de Paul Valéry. Du conteur fantastique à l'érudit, du fin critique à l'inventeur d'un «art de raconter», Schwob est une littérature à lui seul. Il a été une lecture longtemps inavouée de l'auteur de Fictions, et nous offre l'image d'un «Borgès à la française». Sylvain Goudemare qui ne s'est jamais remis de la lecture de Schwob et lui a consacré une excellente biographie (Marcel Schwob, ou les vies imaginaires, Le Cherche-Midi, 2000) offre un «bréviaire» chaleureux, éclairé par l'histoire littéraire. L'édition des Belles-Lettres, plus universitaire, explore davantage l'expérience atypique de l'écriture débouchant sur une réflexion sur la modernité. Ces deux perspectives se trouvent réunies dans le tr