Le plus littéraire de tous les éditeurs français reste sans conteste 6 pieds sous terre. Depuis deux ans, cette maison montpelliéraine publie les aventures en images du célébrissime Poulpe. La dixième livraison est l'adaptation du livre de Pierre Magne par Olivier Quéméré, déjà remarqué l'an passé pour Fin de journée (la 5e couche). Et puisqu'il est ici question de tempête, de naufrage et de petits meurtres sans famille, les encres épaisses de Quéméré font merveille, prédisant tout au long du livre un avis de gros temps bien huileux. En prime, Quéméré possède un art de la caméra subjective et fragmentaire qui vous tourbillonne les entrailles et la cervelle, à mesure de l'alcoolémie de monsieur Lecouvreur.
Le travail de Lionel Tran, Ambre et Valérie Berge autour du roman de Bohumil Hrabal, Une trop bruyante solitude, se situe sur un tout autre plan. Il ne s'agit plus ici vraiment d'une adaptation, mais d'une transposition dans un autre médium qui n'est pas forcément celui de la bande dessinée traditionnelle. Tran, scénariste, Ambre, dessinateur, et Berge, photographe, mettent sur pied une oeuvre d'art, une sorte de dispositif (une installation de 200 m2 sera d'ailleurs visible à Angoulême après avoir clôturé le festival «Bohemia Magica : Une saison tchèque en France» à Lyon) qui nous parle d'un rapport au monde. Tandis que le court récit de Hrabal raconte l'histoire d'un ouvrier qui, pendant trente-cinq ans, pilonne des livres au fond d'une cave avant de s'apercevoir que le mo