«Trois jours sans toi, ma fille, c'est quelque chose; trois jours sans rien de toi, c'est trop», écrit François Guizot à Henriette (septembre 1859). Et elle: «Mon Père, je suis trop heureuse d'être votre fille, d'être à vous.» Tel est le ton des lettres qu'ils échangent de 1836 (il est ministre, elle a 7 ans), à 1874 (il meurt), et dont près d'un millier sont ici publiées. 961 de lui, 24 d'elle, à l'image d'un échange nécessairement inégal: ce père est aussi un «grand homme», même si son rôle politique a pris fin avec la Révolution de 1848, et elle n'est que sa fille . Une fille aimée, autant qu'estimée et requise. Des trois enfants que Guizot a eus avec Elisa Dillon, sa seconde épouse décédée en 1833, elle est l'aînée, la préférée, la plus proche. Pauline, la cadette, paraît plus lointaine et fragile; elle mourra peu avant son père, en 1874, épuisée par ses grossesses (sept enfants) et la tuberculose. Avec Guillaume, le fils mal aimé, rétif, dépensier, décevant, que Guizot s'efforce de caser à l'université, les relations sont fuyantes ou tendues.
D'Henriette, on saurait peu, si Catherine Coste (son arrière-arrière-petite-fille) n'avait donné en ouverture une substantielle biographie de cette femme attachante, écrivaine abondante autant qu'oubliée, pivot de la famille, dévorée par elle. Au miroir des lettres, on la devine intelligente, généreuse, avide, dévouée, hyperactive, angoissée. Surtout, elle aime celui qui fut à la fois le père et la mère (même si les orphelins vivaie