Il y a quarante ans, en 1963, J.M.G. Le Clézio débute. Il a 23 ans. Le Procès-Verbal, son premier roman, remporte le prix Renaudot le 18 novembre, le Goncourt allant à Armand Lanoux. Le 22, le président Kennedy est assassiné, mais c'est une autre histoire. Le 21, Bernard Frank écrit dans France Observateur : «Ce que je sais des deux lauréats, c'est ce que vous en savez. Le Clézio est un de ces beaux jeunes hommes à qui tout réussit et que la critique, pour se prouver qu'elle n'est point jalouse, aime encenser à leur premier livre pour les mieux démolir un jour.» Relisant sa chronique en 1996, pour le recueil En soixantaine, Bernard Frank note : «On ne l'a jamais démoli et à juste titre. Mais quel ennui parfois !» L'ennui est une notion relative.
Révolutions, quelque chose comme le quarantième livre de Le Clézio, est un roman fiévreux. Une double odyssée s'y déploie : celle d'un Breton de 1792 partant conquérir son avenir, et celle d'un Français des années cinquante qui aborde le sien avec appréhension. Tout le monde peut aimer Révolutions. Echecs et effondrements de la société coloniale garantissent la volupté mélancolique de la décadence. C'est surtout un grand roman d'apprentissage, hanté par la guerre d'Algérie. Les adolescents se reconnaîtront dans ce garçon solitaire et disponible qui se sent de nulle part et de partout, fréquente des filles comme lui et d'autres qui le trouvent méchant.
Retour de Maurice
Révolutions abrite des enfants et des vieillards malheureux. Des esc