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Critique

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Est-on obligé d'aller au chevet des gens que l'on n'aime plus? Pas de répit dans la langue impitoyable d'Hélène Lenoir.
publié le 27 février 2003 à 22h44

Non, on a beau dire, on a beau faire, on a beau retourner le livre, relire le titre, le Répit, il n'y a pas de répit, ça commence mal, on le dérange dès la première phrase, le type, ça finira comme ça finira, on verra bien, mais il n'y a pas le moindre répit, le moindre endroit où reprendre son souffle, ses esprits, pas un coin d'ombre où s'abriter des soucis du bonhomme, un arrêt du train où l'on pourrait descendre, se dire tant pis, après tout qu'il se débrouille, ce n'est pas nos oignons. Non, c'est pas nos oignons, mais c'est trop tard, fallait pas commencer, on dit le type, le bonhomme, parce qu'on ne sait pas son nom, ni son prénom, on devrait dire le mari, le mari de Véra, à la rigueur le père de Ludo, après tout, ses ennuis viennent de là. Mais non, au fond, si peu mari, si peu père, un homme perdu. Et Hélène Lenoir qui l'asticote, qui entre dans sa tête, dans ses pensées, qui dit tout de lui, tout ce qu'on ne dit jamais ni à son psy, ni à soi-même, c'est écrit là noir sur blanc, et nous, pauvre lecteur, on est d'accord, tristement d'accord, c'est bien comme ça, noir et gris comme ça, sombre et lâche, l'âme humaine.

On dira l'histoire un peu plus loin (elle tient en neuf lignes sur la quatrième de couverture, et pourtant pas un mot de trop dans les dix douzaines de pages, c'est comme un battement de coeur, on saute une ligne et c'est l'infarctus, c'est le cas de le dire, vous verrez), l'effet de réel est tel qu'on y croit, qu'on s'y croit, qu'on est ce type perdu, égo