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Libération
Critique

La Crète des sentiments.

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publié le 20 mars 2003 à 22h13

Au début des Initiés, épais roman publié par Hella Haasse en 1958, on se demande bien pourquoi elle traîne sur les routes de Grèce une famille américaine antipathique et assez peu vraisemblable : la fille aînée en voyage de noces (le mari est un jeune coq français caricatural), la petite soeur dépressive, le père qui a démissionné et la mère odieuse. La perplexité s'accroît lorsqu'un jeune Crétois prend le relais du récit pour expliquer les luttes politiques nées de la guerre. Où Hella Haasse veut-elle en venir ? Le malaise est de courte durée : comme d'habitude, avec sérénité, elle nous emmène dans les hauteurs, fréquenter les mythes, jeter un oeil de l'autre côté des apparences. On rejoint bientôt dans un village de montagne un professeur hollandais obsédé par l'initiation aux mystères d'Eleusis, et surtout une vieille dame, Elina, qui fut naguère un peintre inspiré et abandonna les siens, y compris sa fille, pour travailler à la seule chose qui lui importait : «devenir un être humain». Comme dans un roman du XIXe siècle, des président à des retrouvailles familiales rocambolesques. Hella Haasse s'attache essentiellement au message d'indépendance d'Elina : «Je pense que l'homme est un extraordinaire organisme de régulation entre le néant et le tout, entre le chaos et le cosmos.» Elle se meut pour finir avec aisance dans les violences ancestrales et les espoirs amoureux. La Récalcitrante est un roman tout différent, il appartient à la veine historique d'Hella Haasse, qui sa