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Critique

A prendre par corps

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Chez l'Anglo-Pakistanais Hanif Kureishi, l'autofiction n'empêche pas la science-fiction: le voici en vieillard endossant la peau d'un jeune mort.
publié le 24 avril 2003 à 22h58

Né en 1954 dans le Kent d'un père pakistanais et d'une mère anglaise, Hanif Kureishi a débuté avec des pièces, Outskirts et Borderline, mais s'est surtout fait remarquer grâce au scénario de My Beautiful laundrette (1984), réalisé par Stephen Frears. Albion y avait un tout autre visage : le protagoniste était jeune, asian (à savoir, du sous-continent indien), et gay. En 1990, il publie le Bouddha de banlieue, prix Whitbread du Premier roman. C'était l'histoire de Karim, un jeune Anglo-Pakistanais qui s'échappait de la banlieue sud de Londres pour s'installer à la capitale et y tenter une carrière de comédien. Il y avait là quelques parallèles entre le destin de l'auteur et le parcours initiatique du héros. Mais comme le remarque Kureishi dans «l'...criture : un don», qui ouvre le recueil d'essais Souvenirs et divagations, la question de savoir si l'oeuvre est autobiographique «paraît bizarre et même redondante» : «où irais-je puiser les sujets sinon en moi ?» Car «le problème n'est pas de découvrir sa voix mais de comprendre qu'on en a déjà une ­ tout comme on a une personnalité ­ et que, si l'on persiste à écrire, on n'a pas d'autre choix que de s'exprimer et de vivre avec. Au fond, il s'agit de prendre possession de soi : l'être humain et l'écrivain ne font qu'un.»

Aussi, à chacun de ses ouvrages, a-t-on l'impression de vieillir avec lui. Dans le Bouddha de banlieue c'était la voix d'un jeune homme, le point de vue du fils, qu'on entendait ; dans Intimité résonnait ce