Qu'un livre sur les mystifications littéraires tienne lui-même de la mystification, il n'y a rien de stupéfiant. Charles Nodier, né en 1780 et mort en 1844, fantaisiste auteur d'Histoire du roi de Bohême et de ses sept châteaux, Jean Sbogar et Smarra ou les Démons de la nuit, est une sorte de frère aîné des romantiques, soutien de la première heure de Victor Hugo. Sous-titré Du plagiat, de la supposition d'auteurs, des supercheries qui ont rapport aux livres, Questions de littérature légale est d'abord paru de façon anonyme en 1812, avant qu'une nouvelle édition, «considérablement augmentée», ne soit publiée sous son nom en 1828. «Stigmatisant ces "actions si honteuses" que sont la contrefaçon, la production de faux manuscrits, la supposition de livres ou d'auteurs, Nodier réprouve des méfaits que lui-même n'a pas manqué de perpétrer. Expert, il l'est en vertu de sa compétence théorique, de son expérience personnelle aussi bien», écrit Jean-Yves Jeandillou dans son introduction à ces Questions de littérature légale dont il montre par ailleurs comment les spécialistes de Nodier ont toujours eu du mal à se dépêtrer, excluant plus ou moins le texte de ses oeuvres complètes. Ses connaissances pratiques donnent pourtant à Nodier des compétences particulières pour aborder un sujet pour lequel toute sa vie et son travail témoignent qu'il a manifesté le plus grand intérêt. On fait plus confiance à un escroc qu'à un honnête homme quand il s'agit de parler escroquerie.
Le texte est pré